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San Sebastian 2009: interview de Bertrand BonelloTIRESIA est le film que Bertrand Bonello vient présenter dans la section THE CUTTING EDGE OF FRENCH CINEMA. Ayant fait l’entretien avant la projection du film, je poserai des questions plus globales…. J’avais rencontré Bertrand Bonello à Cannes en 2008, lorsqu’il avait présenté son dernier film, De la guerre, à la Semaine de la Critique. On s’était croisé au Jimmy’s (où j’avais pu rentrer et lui pas, allez savoir pourquoi…) puis au Baron où il était en compagnie de Clothilde Hesme. Je le revois à San Sebastian, dans l’hôtel Maria Cristina, avec une petite mine. Un rhume qui s’éternise… Au début de l’interview je le sens un peu crispé, mais, étrangement, lorsque ma caméra s’éteint et que je décide de poursuivre par écrit, cela semble le soulager. C’est vrai que montrer sa tronche quand on n’est pas en forme a quelque chose de peu gratifiant… L’entretien s’est donc vite dégelé et a pris des airs de conversation. Ce qui suit n’en est pas une retranscription littérale mais un compte-rendu aménagé… CR : Etant donné que vous vous êtes avant tout adonné à la musique, j’imaginais que vous pouviez envisager la création d’un film selon un processus similaire à celui de la composition musicale. BB : La musique se crée dans l’espace et le cinéma dans le temps. Bien sûr, dans l écriture de scénario, ainsi que dans le montage, il est question de rythme, mais le processus global de fabrication d’un film s inscrit dans la durée, comme pour l architecture: on fait un plan, puis on établit un budget, ensuite on construit, et le travail se boucle avec les finitions. Chaque étape annule la précédente, le retour en arrière est impossible. L’objet film se transforme à chaque étape. CR : Le réalisateur est donc moins libre que le compositeur? BB : Il est en tout cas, comme tout artiste, plus libre que dans la vie réelle. Moi en tout cas je me donne la liberté de créer un espace où je peux débrider mon imagination et abolir les limites du réel (comme dans LE royaume du film De la guerre), mais les contraintes viennent de l extérieur: c’est en amont qu’on empêche la liberté de penser. Pour qu’un film voit le jour, et donc pour satisfaire les financeurs, il faut se plier un minimum au système de pensée dominant. Moi je me bats contre ça. CR : Vous considérez vous donc comme élitiste? BB : Pas vraiment, dans le sens où mes films ne demandent pas au spectateur de fournir un effort intellectuel mais au contraire de s'abandonner, de lâcher prise. En général, les spectateurs qui n’ont pas aime mon film sont ceux qui ont justement fourni un effort. CR : Le plaisir du spectateur ne s’obtient donc pas dans l effort. Toutefois il n est pas immédiat. Comme dans De la guerre où le personnage est en quête de plaisir, vous pensez que le spectateur doit rechercher son plaisir plutôt que de se faire imposer un plaisir immédiat? BB : Oui, notre société pousse à des plaisirs immédiats qui endorment et abrutissent les gens. Moi je parle d'un plaisir autre, vertical, qui élève. Par exemple l’ennui peut contribuer au plaisir, il permet l action et la création. CR : Dans De la guerre, vous placez d’ailleurs le plaisir au cœur du combat qui est mené dans le Royaume (dont le reine est jouée par Asia Argento). Pensez-vous que la quête du plaisir doit passer forcément par une retraite dans une secte? BB : Je n’aime pas coller le mot “secte” au Royaume, car c’est un lieu que j’ai imaginé et qui se veut hors du réel. Le mot “secte” renvoie à un jugement moral, or je ne veux pas me positionner idéologiquement et je ne cherche pas non plus à impliquer le spectateur moralement. Et puis, pour mon personnage, il ne s’agit que d’un passage. Rien de définitif. CR : Votre personnage, vous l’avez dit, est un peu votre double. Pourquoi avoir choisi Mathieu Amalric? BB : C’est avant tout une longue histoire d’amitié. Lui-même m’avait demandé au début de sa carrière de réalisateur d’interpréter son double. Je ne l’avais pas fait, mais lui a accepté! Et puis, comme il ne se revendique pas comme un acteur, je trouve son approche du personnage beaucoup plus juste. CR : Vous n’êtes apparemment pas le seul à penser ça: Amalric se retrouve dans quasi tous les films présentés dans la rétrospective du cinéma français! Et votre prochain film, de quoi parlera-t-il? BB : Je viens d’achever le scénario. L histoire se déroule au début du 20ème siècle et met en scène la vie dans les maisons closes. CR : Encore le plaisir et encore l’isolement dans un « royaume »? Qui sera cette fois-ci la reine ? A suivre…. 25.09.2009 | cecilerittweger's blog Cat. : Asia Argento Bertrand Bonello Cannes CUTTING Encore Maria Cristina Mathieu Amalric San Sebastian
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