Polyglotte et voyageuse, il y a quelque chose d’universel chez Hiam Abbass.
Cette actrice, palestinienne d’Israël, fait ses débuts sur les
planches en Palestine avant de s’installer à Londres puis à Paris. En
2005, elle partage l’affiche avec Nathalie Portman dans Free Zone d’Amos Gitaï, en Compétition à Cannes. Elle revient dans la même catégorie en 2011 entourée de Leila Bekhti et Hafsia Hezri pour former la troupe rebelle de La Source des femmes de Radu Mihaileanu.
Vous avez été dirigée par Spielberg,
Mac Carthy, Jarmush. Il vous est arrivé de coacher certains acteurs et
réalisateurs. Forte de cette expérience, qu’est-ce qui fait d’un
réalisateur un grand cinéaste ?
C’est la force de partage
d’un point de vue et d’un regard. Le réalisateur doit réussir à
présenter des parcours sincères, être lui-même sincère. Il y a quelque
chose de la vie, de sa complexité. Dans la vie, on ne ment pas. Quand
elle est présentée avec simplicité, ça ne passe pas. Quand les
histoires sont aussi complexes que dans la réalité, il y a un
attachement qui se crée entre le spectateur et l’histoire.
Vos rôles vous ont conduit aux Etats-Unis, en Lybie, en Espagne … Pouvez-vous dresser un état des lieux du cinéma mondial ?
J’aime
bien sa conscience et sa diversité. La conscience des jeunes cinéastes
qui prennent en charge ce qui se passe dans le monde avec un
engagement à faire de l’art quelque chose d’utile. Ce partage ne
changera pas le monde mais fait réfléchir et éveille les esprits. Il y
une recherche, notamment dans le monde arabe d’où je viens.
Justement, quel regard portez-vous sur le cinéma israélo-palestinien ?
En
Israël, plusieurs fonds aident les films. Un Palestinien passe parfois
sept ans à rassembler assez d’argent. Il y a des noms connus pour qui
c’est plus simple et des jeunes qui n’arrivent pas à les sortir. Les
histoires, c’est différent aussi. Les Palestiniens ont envie de
partager avec le monde des sujets qui touchent leur société.
L’Israélien fait du cinéma au-delà du conflit. Il peut parler de rêve,
d’autre chose que de politique.
Les personnages que vous incarnez sont souvent engagés, révoltés, parfois malmenés. Où puisez-vous l’inspiration ?
La
première inspiration, c’est le scenario que je reçois, de l’échange
que j’ai avec le réalisateur puis de ce que j’ai envie de mettre dedans.
Ça dépend de la manière dont je m’attache au personnage. . Je joue
toujours des femmes qui avancent et combattent. Il y a une chose que je
fais dans ma vie : quand je m’engage, je m’engage. Sinon, je reste chez
moi et je me couche.
Vous terminez actuellement Héritage, votre premier long métrage. Pourquoi ce besoin de passer derrière la caméra ?
Ca
a pris du temps parce que j’étais engagée comme comédienne. Ces années
où j’ai travaillé avec Iñárritu ou Spielberg m’ont fait réfléchir.
J’ai des choses à dire, des histoires à raconter au-delà des
personnages auxquels je donne mon corps et mon esprit.
AST