Le cinéma philippin confirme son retour en force au Festival de Cannes avec la présentation, en parallèle de Kinatay de Brillante Mendoza en Compétition, de Independencia à Un Certain Regard. Ce long métrage, dont l’action se déroule à l’aube du 20e siècle, dans un contexte historique marqué par l’annexion américaine des Philippines, est réalisé par Raya Martin, qui a également fait le déplacement sur la Croisette pour dévoiler Hors Compétition un autre de ses films, Manila. Face à l’arrivée des troupes US, une mère et son fils fuient vers la montagne à la recherche d'une vie plus sûre. Un jour, au milieu de la forêt, le garçon découvre le corps gisant d'une femme abusée qu'il décide de ramener dans leur abri…
Remarqué en 2008 avec A Short Film About The Indio Nacional, Raya Martin a commencé à travailler sur Independencia alors qu’il participait à la Résidence de la Cinéfondation en 2005. "A la Cinéfondation, j’ai écrit un traitement court mais détaillé de l’histoire de la mère et du fils, explique-t-il. Il s’agissait d’un canevas comportant des actions basiques (manger, respirer, marcher) et des notes d’humeur composées d’éléments naturels comme le vent, l'eau, les ciels. Je voulais le tourner tout de suite, vivre dans les montagnes avec une caméra 16 mm et une équipe réduite au strict minimum, d’une manière purement documentaire, mais cela ne s'est pas fait. Le projet est devenu une partie de la série sur les luttes. Entre-temps, mes intentions avaient évolué. L’idée originale n’était pas simplement d’imiter le style d’une certaine époque, mais aussi de suivre l’évolution d’un cinéaste, du muet au parlant, à autre chose. L’élément studio a donc été introduit."
Au sujet de cette esthétique studio dont est empreint le film, Raya Martin s’explique : "Formellement, Independencia imite l'esthétique des films de studio durant l'occupation nord-américaine, tandis que son récit expose une histoire de résistance durant cette même période. Mon idée était d'exposer ce substrat hollywoodien et de le subvertir afin de redéfinir nos véritables luttes. La fausse bande d'actualité au milieu du film est un bon exemple. Elle est basée sur le véritable récit d'un Américain concernant la mort d'un enfant philippin. Cette bande fait allusion aux entractes pratiqués pendant les séances de cinéma à cette époque."