Le Festival de San Sebastián consacrera une rétrospective au réalisateur français Barbet Schroeder
Le Festival International du Film de San Sebastián consacrera, lors de sa 54e édition du 21 au 30 septembre 2006, une rétrospective au réalisateur, producteur et acteur français Barbet Schroeder, qui a contribué aux débuts de réalisateurs de la Nouvelle Vague dans les années 60, comme Eric Rohmer et Jacques Rivette, et signe une filmographie comme réalisateur toujours en prise sur son temps.
Pionnier de la fusion entre documentaire et fiction et voyageur inquiet attentif aux particularités de chaque pays et culture, Schroeder a une filmographie riche et variée, qui va du reflet, fin des années 60, de questions sensibles comme la drogue dans More (1969), l’amour libre et la quête du paradis dans La Vallée (1972), à l’étude du masochisme dans Maîtresse (1976), le documentaire politique Idi Amin Dada (1974), ou encore une étape américaine débutée par l’adaptation de Charles Bukowski, Barfly (1987) et incluant des thrillers particuliers comme Reversal of Fortune (Le mystère von Bulow, 1990), Single White Female (JF partagerait appartement, 1992) ou Kiss of Death (1995), auxquels on peut ajouter sa lecture de la violence en Colombie, La virgen de los sicarios (La vierge des tueurs, 2000).
Barbet Schroeder a été nominé pour l’Oscar du meilleur réalisateur en 1991 avec Reversal of Fortune (Le mystère von Bulow), sélectionné aussi en compétition au Festival de Cannes avec Barfly (1987) et à la Mostra de Venise avec La virgen de los sicarios (La vierge des tueurs, 2000).
Barbet Schroeder est né en 1941 à Téhéran (Iran) où son père d’origine suisse travaillait comme géologue. Il a étudié la philosophie à La Sorbonne à Paris et a commencé à écrire pour la revue Les Cahiers du Cinéma en 1958. Son premier travail dans le cinéma a été un petit rôle dans Les carabiniers (1963) de Jean-Luc Godard. Cette même année, il entame sa carrière de producteur en fondant Les Films du Losange, qui finance les premiers films d’Eric Rohmer, La boulangère de Monceau (1963) (interprété par Schroeder lui-même), La carrière de Suzanne (1963), La collectionneuse (1967), Ma nuit chez Maud (1969) et Le genou de Claire (1970), entre autres. Sa société a également produit des films de Jacques Rivette, comme Céline et Julie vont en bateau (1974), et de Rainer Werner Fassbinder, Chinesisches roulette (Roulette chinoise, 1976). Il a également produit le film collectif Paris vu par… (1965), réunissant les réalisateurs Claude Chabrol, Jean Douchet, Jean-Luc Godard, Jean-Daniel Pollet, Eric Rohmer et Jean Rouch.
Schroeder débute comme réalisateur en 1969 avec More, qui reflète l’expérimentation de la drogue et du sexe propre à l’époque, et souffre de la censure dans différents pays. La bande-son du film créée spécialement par Pink Floyd a contribué à en faire le film culte qu’il est toujours aujourd’hui. Dans la même ligne osée et non-conformiste quant au sexe, aux drogues et autres éléments de la culture hippie, il réalise La vallée (1972), à nouveau avec Pink Floyd pour la bande-son, et avec la participation de l’actrice Bulle Ogier, devenue depuis la compagne de Schroeder, jeune fille à la recherche d’un paradis la conduisant à une tribu dans les forêts de Nouvelle-Guinée. Dans les années 70, Schroeder réalise aussi deux documentaires Idi Amin Dada (1974), sur le dictateur d’Ouganda, et Koko, le gorille qui parle (1978), sur l’utilisation du langage des sourds-muets pour communiquer avec les animaux. Il évoque de nouveau le sexe au travers du sadomasochisme montré crûment dans Maîtresse (1976), avec un jeune Gérard Depardieu et, de nouveau, l’actrice Bulle Ogier.
Après Les tricheurs (1986), un film sur la passion du jeu avec Jacques Dutronc et Bulle Ogier, Schroeder entame une carrière aux Etats-Unis avec Barfly (1987), en collaboration avec l’écrivain Charles Bukowski pour le scénario, et avec Mickey Rourke et Faye Dunaway dans les rôles principaux. En 1990, il réalise l’un de ses films les plus importants Reversal of Fortune (Le mystère von Bulow), basé sur l’histoire réelle d’un aristocrate accusé du meurtre de sa femme. Jeremy Irons reçoit l’Oscar et le Globe d’Or du meilleur acteur pour son interprétation de Claus von Bulow, dont l’épouse est interprétée par Glenn Close.
Schroeder continue à explorer ce mélange de drame et thriller dans Single White Female (JF partagerait appartement, 1992), film interprété par Bridget Fonda et Jennifer Jason Leigh et présenté au Festival de San Sebastián la même année ; Kiss of Death (1995), excellent remake du film homonyme d’Henry Hathaway en 1947, et interprété par David Caruso, Samuel L. Jackson et Nicolas Cage ; Before and After (1996), sur l’affrontement de parents quand leur fils est accusé d’assassinat, avec Meryl Streep et Liam Neeson ; et Desperate Measures (L’enjeu, 1998), où un policier en attente d’une greffe de moelle, se trouve confronté à l’unique donneur possible, un assassin en série, avec Michael Keaton et Andy Garcia.
La virgen de los sicarios (La vierge des tueurs, 2000) marque un nouveau tournant dans la carrière de Schroeder, qui revient dans l’un des pays où il a passé une partie de son enfance, la Colombie, pour y adapter le roman polémique de Fernando Vallejo. Avec sa caméra numérique et une maîtrise parfaite de la steadycam, Schroeder capte toute la violence de Medellin à travers la relation d’amour orageuse entre un homme mûr qui revient dans sa ville natale et un garçon de 16 ans habitué à tuer tous les jours.
Murder by Numbers (Calculs meurtriers, 2002), avec Sandra Bullock et Ben Chaplin, est le dernier film réalisé à ce jour par Barbet Schroeder, qui a aussi joué occasionnellement dans des films aussi différents que La reine Margot (1994), de Patrice Chéreau, Mars Attacks ! (1996), de Tim Burton et le récent film collectif, présenté à Cannes, Paris, je t’aime (2006).