Mia Madre, réalisé par Nanni Moretti

Synopsis : Margherita est une réalisatrice en plein tournage d'un film dont le rôle principal est tenu par un célèbre - et insupportable - acteur américain d’origine italienne. À ses questionnements d'artiste engagée, se mêlent des angoisses d'ordre privé : sa mère est à l'hôpital, sa fille en pleine crise d'adolescence. 
Et son frère, quant à lui, se montre comme toujours irréprochable… Margherita parviendra-t-elle à se sentir à la hauteur, dans son travail comme dans sa famille ?

Nanni Moretti, vainqueur de la Palme d'Or en 200 pour La Stanza del figlio (La Chambre du Fils), revient en force avec Mia Madre. Portée à l'écran par un panel d'excellents acteurs, cette histoire touchante et pleine de sensibilité est par la suite discutée autour de la conférence de presse réunissant les co-scénaristes Francesco Piccolo et Valia Santella, les producteurs Domeni Procacci  et Paolo del Brocco et les acteurs Giulia Lazzarini, John Turturro, Margherita Buy et Beatrice Mancini autour du réalisteur et acteur du film, Nanni Moretti.

Margherita (Margherita Buy) réalise un film dans le film dont le personnage principal est interprété par la star américaine Barry Huggins (joué par John Turturro). On suit Margherita dans sa vie de tous les jours, tant sur le plateau autour de ses collègues et acteurs que dans sa vie privée au chevet de sa mère hospitalisée, Ada (Giulia Lazzarini) et aux côtés de son frère Giovanni (Nanni Moretti) et de sa fille Livia (Beatrice Mancini). Mia Madre est à la fois mise en abîme et hommage au cinéma italien. Le film dans le film est un film social dans lequel les employés d'une usine perdent leur emploi suite au rachat de leur entreprise par un homme d'affaires américain. Le personnage de la réalisatrice Margherita compte de nombreuses ressemblances avec Nanni Moretti qui a cependant toujours pensé à ce personnage au féminin. Si Michelangelo Antonioni aimait se cacher dans ses films derrière des personnages féminins, Nanni Morretti, lui, n'avait jamais pensé à ce que ce personnage soit un rôle masculin. Dans la conférence de presse du film dans le film, l'équipe est interrogée sur le devoir du cinéma, on en profitera pour poser la même question à Nanni Moretti ; il s'agit tout simplement pour lui de faire des films, si possibles nouveaux, pas des films que l'on a vu 300 fois déjà.

Le film mène du rire aux larmes et pour le réalisateur, c'est tout bonnement sa manière de raconter la vie, car il y a "toujours des moments douloureux et drôles dans la vie, c'est comme ça". Les moments douloureux racontent la fin d'une vie et les défis d'une autre vie, celle d'une femme qui doit mener de front sa carrière, sa vie sentimentale en dents de scie, l'adolescence d'un enfant et les difficultés à établir des rapports humains. Le personnage de l'homme d'affaires américain apporte le comic relief de ce film, avec sa maladresse et son caractère lourd et pataud, il multiplie aussi les références aux grands noms du cinéma italien en arrivant dans la Roma di Fellini, au son de Bevete piu' latte de Boccaccio 70'. Comme le dit Danièle Heymann, présentatrice de la conférence de presse, "Il faut être un très, très grand acteur pour jouer un très mauvais acteur".

Un film, mais aussi une véritable poupée gigogne qui donne en héritage à ceux qui restent, et à ce qui reste, cette culture qui dans le film est resprésentée par les livres, l'apprentissage du latin, les souvenirs. Les souvenirs qui se mêlent à la réalité, aux rêves et aux fantaisies, rappellant par là sûrement un peu le Amarcord de Fellini. Pour Nanni Moretti, "le  temps du film est le temps de l'état émotionnel de Margherita", on ne se rend pas immédiatement compte dans la dimension dans laquelle on se trouve mais on retourne directement à la réalité, celle du deuil. C'est aussi, dans le film que réalise Margherita, la réalité sociale de ces gens qui perdent leur travail. On confronte la réalité depuis des points de vue et des registres différents.

Il s'agit là d'un des trois films italiens qui sont cette année en lice pour la Palme d'or, avec Il Racconto dei Racconti de Matteo Garrone et le très attendu Youth (La Giovinezza) de Paolo Sorrentino. Selon Moretti, cette présence en masse est le fruit d'un travail individuel plus que d'un climat autour du cinéma, selon lui "toujours distrait" en Italie.

Crédits : Nanni MORETTI - Réalisation, Nanni MORETTI - Scénario / Dialogues, Francesco PICCOLO - Scénario / Dialogues, Valia SANTELLA - Scénario / Dialogues, Arnaldo CATINARI - Directeur de la photographie, Paola BIZZARRI - Décors, Alessandro ZANON - Son, Clelio BENEVENTO – Montage

Acteurs : Margherita BUY - Margherita, John TURTURRO - Barry Huggins, Giulia LAZZARINI - Ada, Nanni MORETTI - Giovanni, Beatrice MANCINI - Livia

Lara A.